Gens du voyage sur toile

© Numa Sutter
i
© Numa Sutter

Gens du voyage sur toile

Préjugés
Les peintures de l’artiste biennois Numa Sutter, consacrées aux yéniches, gitans et manouches, sont à découvrir en l’église du Pasquart de Bienne. Plusieurs événements permettront de mieux connaître ces communautés souvent marginalisées.

Durant plus de trois ans, le graphiste-designer de formation Numa Sutter s’est frotté aux communautés des gens du voyage. Il a tenté de rendre en peinture leur réalité souvent méconnue. «Je voulais rendre compte d’une vision globale sans entrer dans les clichés afin de ne pas alimenter l’imaginaire collectif qui véhicule souvent une image trop négative», note l’artiste. Le résultat consiste en une série d’oeuvres de techniques mixtes. Une partie d’entre elles, réalisées en grands formats, donnent une vision solaire des manouches et du flamenco.

Échos d'enfance

Cette fascination pour les gens du voyage, il l’a développée durant son enfance lors de ses vacances en Camargue et dans d’autres régions du sud de la France. «J’ai eu de nombreuses interactions, parfois directes, parfois plus superficielles, avec ces communautés. J’ai toujours ressenti une bonne entente et j’avais envie de mieux les connaître», complète Numa Sutter. Devenu adulte, alors qu’il effectue sa formation d’arts visuels et de designer à la Haute école des arts de Berne, il se lance dans un projet personnel et part rencontrer les gens du voyage en Provence et en Suisse. Il documentera notamment l’expulsion des yéniches (les gens du voyage suisses) de la ville de Berne en 2014.

Maintien de la paix

S’ensuit un travail artistique engagé qui donne un éclairage sur une question qui fait l’actualité. «Je me suis penché sur l’évolution de la terminologie que la société créait autour des gens du voyage en faisant de nombreux amalgames entre yéniches, gitans ou Roms, qui sont souvent assimilés à une menace. Mon travail aimerait refléter une pluralité humaine que l’on ne peut définir par une généralité», précise Numa Sutter qui devient en quelque sorte un artisan du dialogue avec ces communautés. Peut-être a-t-il gardé quelques traces de son passé militaire où il était notamment chargé du maintien de la paix au Kosovo ou de son engagement en tant qu’animateur dans la paroisse catholique francophone de Bienne, durant lequel il défendait certaines valeurs…

Sujet d'actualité

Le 9 février dernier, le peuple bernois était invité à s’exprimer sur un crédit pour la création d’une aire de transit destinée aux gens du voyage étrangers à Wileroltigen, près de la frontière fribourgeoise. Le oui l’a emporté à 53,5%. La votation a toutefois suscité de nombreuses polémiques, preuve que le sujet reste tendu. Pour le pasteur Luc N. Ramoni, coordinateur de l’association Présences qui organise l’exposition, il est important d’ouvrir la discussion: «Mieux connaître les gens du voyage est un moyen de dépasser les clichés qui leur collent à la peau». Chacun est d’ailleurs cordialement invité à venir esquisser ses préjugés lors d’un atelier de dessin avec l’artiste. Ces oeuvres spontanées viendront enrichir l’exposition et nourrir le débat.

Exposition Sur la route

A voir jusqu’au 2 mai, me-sa-di 14h-17h, église du Pasquart de Bienne. Me 11 mars, 16h-22h, atelier de dessin avec l’artiste. Di 22 mars, 10h, culte 4D et présence de Yéniches suisses. Lu 30 mars, 19h, témoignages filmés et discussion avec l’artiste.

Infos : www.presences.ch.