Le prêtre Thomas Frings choque avec le «renouveau réactionnaire»

«L’Évangile n’a pas de structure» pour Thomas Frings, prêtre à Cologne dans le quartier de Porz. / ©Stefan Sättele
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«L’Évangile n’a pas de structure» pour Thomas Frings, prêtre à Cologne dans le quartier de Porz.
©Stefan Sättele

Le prêtre Thomas Frings choque avec le «renouveau réactionnaire»

Propos recueillis par Holger Wetjen
27 novembre 2018
Allemagne
Renouveler l’Église sur la base des sacrements, voilà la position «révolu-réactionnaire» de Thomas Frings. Il est prêtre à la paroisse catholique Sankt-Maximilian-Kolbe à Cologne-Porz et aumônier au Cloître des Bénédictines à Cologne — Radersberg. Dans son livre intitulé «Aus, Amen, Ende?» (Amen. C’est fini?), il propose d’accepter que dans l’avenir, l’Église catholique sera un «petit groupe»: les paroissiens feront le maximum des travaux pratiques eux-mêmes. Et forte de ce soutien pratique, l’Église catholique pourra mieux se recentrer sur son offre exclusive que sont les sept sacrements.

Votre livre s’intitule: «Amen. C’est fini. Je ne peux plus être curé comme ça». Dans ce livre, de quoi parlez-vous?

Je parle de la situation de l’Église en Allemagne. Sa particularité, c’est qu’elle a beaucoup d’argent et qu’en même temps, elle perd énormément de fidèles. Ces personnes quittent l’Église parce que cette Église n’a plus rien à voir avec leur vie. Son programme correspond de moins en moins avec ce que les humains veulent réellement. Les Églises deviennent de plus en plus riches. En même temps, quand elles utilisent cet argent, elles sont aujourd’hui plus inefficaces que jamais! Les deux grandes Églises en Allemagne ont quinze milliards d’euros! Mais cet argent, elles ne sont pas capables de l’utiliser pour que les gens restent membres!

L’Église, gère-t-elle bien son argent?

Oui! L’Église gère son argent de façon responsable. Elle est le deuxième employeur en Allemagne. Mais en même temps, cette Église n’accède plus à la vie intérieure des gens. Il s’ajoute un autre problème: il y a un nombre croissant de personnes qui sont employées de l’Église, mais qui n’en sont plus membres. Je constate que cette Église ne propose plus rien qui puisse servir à la vie réelle de ces personnes!

Quelle solution proposez-vous dans votre livre?

Je sais que dans les années à venir, nous ne serons plus la Grande Église.

Et ça, vous le dites clairement dans votre livre?

Oui! Il faut que nous nous préparions au fait que dans l’avenir, notre Église soit un tout petit groupe. C’est déjà la réalité aujourd’hui. Et c’est ce qui fait la différence avec l’Église telle qu’elle se présentait il y a cinquante ans. Il y a cinquante ans, on était obligé d’être membre de l’Église. Aujourd’hui, c’est le contraire: personne n’est plus obligé. Chacun peut décider lui-même s’il adhère à une Église ou non. C’est pour cela qu’il faut demander explicitement aux gens: «Toi, que cherches-tu à l’Église?» Les gens prennent conscience que l’Église, c’est eux! On ne prend toujours pas suffisamment en considération que ce sont les gens qui doivent être eux-mêmes l’Église!

Ces gens, que cherchent-ils aujourd’hui à l’Église?

Ils cherchent un lieu où l’on leur offre du spirituel et de la religion. Voilà ces grands mots kitsch que les humains disent et redisent.

Aimez-vous ces mots kitsch?

Oui! Mais il faut savoir que l’on ne peut pas définir ces mots! Le spirituel est individuel! Chacun imagine le spirituel d’une façon qui lui est propre. Le spirituel n’a pas de structure!

En 2010, vous avez vidé l’espace de votre église à Münster et proposé aux paroissiens d’y installer leurs propres fauteuils: mais si l’Église — comme vous le prévoyez — sera de toute façon une minorité dans l’avenir, à quoi bon faire des actions comme celle avec les fauteuils? Vous avez mis une crèche en Play -mobil dans votre église: A quoi bon d’être novateur avec une crèche en Play -mobil si cette Église sera de toute façon une petite minorité dans l’avenir? Le curé ne peut-il pas, au contraire, se dire en toute sérénité: «Rien n’a besoin d’évoluer dans l’Église!»

Non. Le renouveau est une mission claire dans l’Évangile! Après, il y a mille façons de renouveler l’Église: on peut écrire un livre. En 2010, nos paroissiens ont apporté pendant trois semaines leurs fauteuils dans l’église, et ils ont été enthousiasmés! Dire que tout peut rester comme c’est, ce serait du fatalisme! En 2006, le pape Benoit XVI a lancé dans son discours à Fribourg-en-Brisgau le terme de la «dé-sécularisation». Il a ensuite parcouru les médias. Cette dé-sécularisation nous donne une mission double: dans un premier temps, l’Église se trouve en pleine face du monde. Mais en même temps, l’Église est une Église dans le monde: elle doit être proche des humains.

Si les humains veulent être eux-mêmes l’Église et que des mots comme le spirituel sont individuels: que reste-t-il à faire au prêtre?

Dans l’Église catholique, le prêtre a une instruction claire: celle de donner les sacrements.

Pourquoi les sacrements sont-ils si importants?

Parce qu’ils sont pour nous les signes sensibles que Dieu est proche! Dieu est évidemment proche, je peux le voir partout, mais le sentir vraiment, je ne le peux que dans les sacrements. Tous les sept sacrements sont importants. Mais le sacrement le plus décisif est le baptême. Les sept sacrements sont: le baptême et l’eucharistie, la confession et la confirmation, le mariage et l’ordination des prêtres, l’extrême-onction. Il existe deux façons d’attribuer les sacrements: d’abord, c’est le prêtre qui attribue les sacrements. Ensuite, les fidèles peuvent s’attribuer les sacrements mutuellement.

Quelle théorie développez-vous dans votre livre autour du renouveau?

Dans mon livre, je présente un modèle pour construire la communauté différemment: en partant du baptisé. Je crois que mon modèle est réaliste. Certains l’ont appelé pessimiste. Mais moi, je dis qu’il est réaliste. Je décris dans mon livre et dans ce modèle deux choses: d’abord je décris comment la communauté peut vraiment faire vivre les sacrements. Et deuxièmement, je décris quelle est la signification de ces sacrements.

Quelle a été la réception de votre livre?

Le livre se vend assez bien. Bien des lecteurs le trouvent intéressant. Et surtout, la presse a donné un écho très favorable à ce livre.

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