Trouver un métier à l’ombre du clocher

Le clocher de l'EERF est visible de loin au salon Start! / ©Max Idje
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Le clocher de l'EERF est visible de loin au salon Start!
©Max Idje

Trouver un métier à l’ombre du clocher

6 février 2019
Formation
Pour la troisième fois, l’Église réformée est présente au forum des métiers de Fribourg avec un stand original. Elle propose aux écoliers du canton de découvrir les métiers de diacre et de pasteur et de trouver leur voie en escaladant le clocher d’une église.

En file indienne et en chaussettes, ils attendent, impatients. Quand vient leur tour, la chorégraphie est la même pour chacun. Agripper une prise d’une main d’abord, puis de l’autre et se hisser à la seule force de ses bras. En équilibre sur le mur de grimpe, il ne faut rien lâcher et avancer d’une face à l’autre. Faire retentir une cloche et continuer jusqu’à s’immortaliser par un selfie dans l’effort avant d’enfin rejoindre le plancher des vaches pour admirer le cliché. Au sol, le comité d’accueil est composé de deux diacres et trois pasteurs. Le mur de grimpe est un clocher, installé sur le stand de l’Église évangélique réformée fribourgeoise (EERF) au forum des métiers Start! à Fribourg.

Les alpinistes éphémères ont entre 12 et 14 ans, ils sont en 9e et 10e Harmos, en cycle d’orientation. Ils viennent des quatre coins du canton pour rencontrer des professionnels de tous horizons et découvrir quelque 230 métiers présentés du 5 au 10 février à Forum Fribourg.

Dans les allées de la manifestation, les jeunes passent d’une simulation de coupe de bois dans une scierie au fer à lisser du coiffeur, en passant par une imprimante 3D, des platebandes à semer sans oublier de se fabriquer une plaque d’identité militaire ni de réanimer les mannequins des ambulanciers.

Haut de six mètres, bardé de violets et de verts pétillants, le clocher de grimpe surplombe l’agitation ambiante. Impossible de le rater. S’il n’est pas un appât, il reste un argument de vente qui fait mouche auprès des écoliers qui se pressent sur le parvis, avec pour la majorité comme seul intérêt d’en escalader les parois.

Être présent pour exister

Sur le stand, l’EERF en profite pour présenter les différentes facettes des métiers de diacre et de pasteur. Sous la forme de saynètes mises dans des petites boîtes, on découvre les mondes de la prison, de l’armée, des EMS, de l’hôpital, de la paysannerie, de la jeunesse, du handicap et de la migration, autant de lieux dans lesquels l’Église est présente. «Les ministres ne font pas que célébrer des mariages et des services funèbres, contrairement aux idées reçues de bon nombre de visiteurs», explique Francesca Farrow, diacre de l’EERF, à l’origine du projet. Il faut dire qu’en terre catholique, les références ne servent pas la minorité réformée. «Vous faites quoi toute la journée dans l’église? Vous pouvez vous marier? Pasteur c’est un vrai métier pour lequel vous êtes rémunéré? Mais en fait, vous êtes qui?», telles sont les questions récurrentes que les jeunes curieux adressent aux ministres sur le stand. «Cela nous donne l’occasion d’ouvrir des discussions intéressantes qui dépassent les questions de formations. Certains vont même jusqu’à se confier. Alors on prend, on écoute. Finalement, c’est presque une aumônerie!», raconte la diacre.

Si les élèves découvrent deux métiers, beaucoup y apprennent l’existence même de l’Église réformée. «L’objectif ultime est de pouvoir susciter des vocations, mais il s’agit surtout de présenter l’Église réformée, dont certains ignorent même l’existence», ajoute Ludovic Papaux, pasteur de l’EERF. «Il est important que les jeunes puissent voir que derrière l’Église, il y a des hommes et des femmes. Nous ne sommes pas des extraterrestres, mais des personnes lambda, avec des convictions», précise Didier Meyer, pasteur de l’EERF.

Casser les préjugés

Une fois le mur de grimpe escaladé, les ministres abordent les jeunes pour se présenter. «Je leur demande de me raconter leur expérience sur le mur. Ils disent avoir été encouragés, soutenus, guidés parfois. Je leur réponds qu’ils viennent de faire l’expérience de ce qu’est notre métier. C’est le meilleur moyen de le comprendre», illustre Frédéric Siegenthaler, également pasteur de l’EERF.

«Je trouve bien que l’Église ait un stand. On pense que les ministres ne s’occupent que de religion et que ce métier est très strict. Faire de la grimpe, c’est original et inattendu pour une Église», lâche Tomasi, un écolier fribourgeois. Il est avec son camarade Angelo. S’il a apprécié l’activité, il ignore encore l’entreprise qui se cache derrière. Branchés informatique et architecture, les deux jeunes garçons n’envisagent pas de travailler au sein de l’Église. C’est aussi le cas de Marc, catéchumène de l’EERF. Il est venu saluer son pasteur, Jean-Philippe Blaser et faire de l’escalade. «Je ne compte pas devenir ministre, mais peintre en carrosserie. Pourtant, exercer un autre travail ne signifie pas s’éloigner de l’Église.»

«Les écoliers présents au salon sont encore jeunes pour décider de devenir ministre. La question se pose souvent plus tard. Mais en étant présents avec une telle activité, nous espérons leur donner une image positive de l’Église et peut-être marquer leurs esprits. Si chaque année, un à deux jeunes disent envisager une carrière de ministre, nous rencontrons surtout des adultes, en reconversion professionnelle qui expriment un intérêt pour nos formations», lâche Pierre-Philippe Blaser, président du Conseil synodal de l’EERF. «Nous sommes là pour semer et non pas pour récolter», ajoute Francesca Farrow.

«Ça vous dit de monter?», lance Frédéric Siegenthaler à un groupe d’adolescents qui s’approchent timidement. Alors que tous déposent leur sac, une jeune fille se propose de les surveiller. «Tu sais quel est mon truc? Je ne regarde pas en bas!», lui souffle le ministre en passant.

 

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