Les réformés sont-ils prêts à marier les homosexuels?

Les Églises réformées ne sont pas toutes au diapason, selon les cantons, quant à la liturgie à adopter pour un mariage pour tous devant Dieu.
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Les Églises réformées ne sont pas toutes au diapason, selon les cantons, quant à la liturgie à adopter pour un mariage pour tous devant Dieu.

Les réformés sont-ils prêts à marier les homosexuels?

23 novembre 2021
Dès le mois de juillet 2022, les couples de même sexe pourront se marier civilement. Mais qu’en est-il dans les Églises réformées de Suisse romande? L’entrée en vigueur de la loi coïncidera-t-elle avec la possibilité de s’unir devant Dieu? Tour d’horizon des institutions cantonales pas toutes au diapason.

Dès le 1er juillet prochain, les couples homosexuels accéderont au mariage civil. Mais pourront-ils aussi passer devant le pasteur? Dans les Églises réformées romandes en tout cas, la question n’est pas encore tout à fait réglée. Si la faîtière (Église évangélique réformée de Suisse) avait donné une impulsion favorable au «mariage pour tous» en 2019 déjà, elle avait aussi rappelé le libre choix de ses Églises membres quant à une célébration religieuse. Ces dernières, qui ne sont pas toutes égales face à la question, ne sont pas assurées d’être à temps, en juillet, pour unir les couples de même sexe. À l’exception des Genevois, qui pratiquent déjà une liturgie identique pour tous les couples, et des Fribourgeois, qui seront prêts, dès le 1er juillet, à marier tout le monde de la même façon.  

«Au sujet du mariage, la loi de notre Église parle des "époux", sans préciser s’il s’agit d’un homme et d’une femme. Nous n’aurons donc pas besoin de modifier notre règlement ecclésiastique», se réjouit Pierre-Philippe Blaser, président du Conseil synodal (Exécutif) de l’Église évangélique réformée du canton de Fribourg (EERF). Ainsi, à Fribourg, tous les couples réformés seront logés à la même enseigne, et ce dès l’entrée en vigueur du mariage civil. «Une célébration similaire leur sera offerte», poursuit Pierre-Philippe Blaser, qui précise toutefois que les pasteurs qui ne se sentent pas en accord avec l’exercice pourront s’abstenir. Une clause de conscience qui s’applique d’ailleurs dans toutes les Églises réformées de Suisse romande. «Cela n’est pas encore concrétisé, mais nous nous organiserions à l’interne si cela devait représenter une difficulté pour l’un de nos ministres», note encore le pasteur fribourgeois.

À Genève, le Consistoire (Législatif) avait déjà voté très largement, en 2019, en faveur d’une bénédiction identique pour les couples de même sexe que pour les couples de sexe différent. Mais quid de la liturgie de mariage? A-t-elle été adaptée pour convenir également aux couples homosexuels? Selon Adrian Stiefel, répondant ecclésial de l’Église protestante de Genève (EPG) pour les questions LGBTIQ+, «les ministres sont invités à se baser sur la liturgie en usage à l'EPG, tant pour les couples hétérosexuels que pour les couples de même sexe, avec une large place faite à la créativité et à une parole adaptée à la réalité de chaque couple». Par ailleurs, la Compagnie des pasteurs et des diacres a entrepris «une réflexion sur les nouvelles ritualités et l'accompagnement de nouvelles formes de conjugalités et de configurations familiales», selon la demande du Consistoire. Elle poursuit actuellement ce chantier dans le but de renouveler et actualiser ses liturgies, en particulier concernant les personnes LGBTIQ+, en vue de l'entrée en vigueur du «mariage pour tous» le 1er juillet 2022.

Là où on bénit déjà

Dans le canton de Vaud, cela fait une dizaine d’années qu’un «rite pour partenaires enregistrés du même sexe» est possible dans l’Église réformée, indépendamment de la loi fédérale. «La question est maintenant de savoir si nous conservons deux célébrations distinctes ou si nous n’en aménageons plus qu’une», explique le conseiller synodal Laurent Zumstein. «Nous avons un synode en mars, mais nous ne serons pas prêts. Le vote aura lieu en juin 2022», renseigne le Vaudois, qui n’exclut pas qu’une consultation ait lieu au préalable. Ainsi, si les délégués acceptent d’adopter une liturgie unique, son application devrait être retardée de quelques mois par rapport à l’entrée en vigueur du mariage civil en juillet, pour des raisons protocolaires.

Les Églises réformées de Berne-Jura-Soleure (BEJUSO), quant à elles, font figure de précurseur en matière de bénédiction des couples de même sexe, celles-ci étant pratiquées depuis 1999 dans les trois cantons. «Le pas à franchir est donc relativement petit et les liturgies sont facilement adaptables», fait remarquer Philippe Kneubühler, conseiller synodal, qui se dit satisfait après un synode réflexif en octobre, autour de la question d’un mariage religieux pour tous. «Face à certaines résistances qui semblent toutefois minoritaires, nous avons garanti aux pasteurs une totale liberté quant à la célébration de ces unions.» L’adoption de cette liturgie unique doit encore être acceptée par un vote, lors du synode d’été prévu pour la fin du mois de mai.

Là où on ne bénit pas encore

Dans le canton du Valais, rien n’est encore engagé. «Toutefois, rien n’empêche de pratiquer de telles bénédictions, même si le Synode ne s’est jamais prononcé à ce sujet», commente Gilles Cavin, qui ajoute que le règlement ecclésiastique, en Valais non plus, ne précise pas que le couple doit être hétérosexuel. En décembre, la Pastorale – qui réunit pasteurs et diacres – doit tout de même rendre au Conseil synodal de l’Église réformée évangélique du Valais (EREV) un rapport sur la bénédiction des couples de même sexe, «qui décidera s’il faut engager un débat sur la question au synode», explique encore le président de l’EREV.

À Neuchâtel, le règlement ecclésiastique n’empêcherait pas non plus de célébrer des unions de couples homosexuels dès le 1er juillet 2022. Toutefois, le Conseil synodal de l’Église réformée évangélique de Neuchâtel (EREN) a estimé qu’une discussion était nécessaire, et qui se tiendra lors de la prochaine assemblée du 1er décembre. «Un vote y sera effectué, qui ne portera pas sur l’acceptation ou non d’une bénédiction pour tous les couples, mais le Synode pourrait, suite au débat, demander qu’une spécification soit inscrite dans le règlement», explique Yves Bourquin, président du Conseil synodal, qui précise que le mot «hétérosexuel» pourrait être accolé à celui de «mariage», créant ainsi une «clause d’exclusion» et relançant le débat sur la liturgie. «Mais il y a des chances pour que la position du Conseil synodal, qui est de ne rien changer, soit largement suivie», rassure le Neuchâtelois, qui promet que dans cette situation, les liturgies ad hoc seraient alors trouvées le plus vite possible.

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