En direct de l’EMS

Célébration du souvenir, novembre 2022, passer sur l’autre rive / © Anne-Marie Droz
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Célébration du souvenir, novembre 2022, passer sur l’autre rive
© Anne-Marie Droz

En direct de l’EMS

Anne-Marie Droz, diacre et aumônière
23 mai 2023
Célébration
Célébrer avec les cinq sens et les quatre saisons, ou quand la Parole se fait gestes, sons et odeurs… Un culte en EMS est l’occasion d’un partage particulier avec les pensionnaires.

Autour de Pâques, cette année, nous avons, mes collègues aumôniers et moi, animé de nombreuses célébrations, avec une assemblée des plus attentives. Comme le disait un vieux monsieur en arrivant: «Je suis heureux de venir à ce culte, Pâques, c’est une fête très importante pour notre foi chrétienne. Je ne sais plus très bien pourquoi, mais vous allez nous le redire…!»

Une célébration ou un culte dans un établissement, ce n’est pas tout à fait comme à l’église, il faut recréer une atmosphère propice à l’entrée en méditation, dans des lieux qui servent soit à l’animation, au partage de discussions ou aux repas. Il s’agit de replanter le décor aussi pour des personnes qui n’ont plus forcément toutes leurs capacités cognitives, d’où l’importance de respecter des rituels, d’utiliser des objets. Une nappe sur la table, une croix, la bible, une lumière. Des fleurs aussi pour marquer le temps des saisons : des primevères puis des jonquilles pour la lumière de Pâques, en automne des feuilles et des courges, l’étoile de Noël ou le sapin.

Est-ce important? Oui, les temps de l’Église se déclinent aussi avec le fil des saisons, le culte des moissons ou des récoltes, du blé et des pommes sur la table, le culte du souvenir avec des fleurs ou des cailloux.

Les participants ne sont pas insensibles à ce qu’ils ont devant les yeux, à défaut parfois de comprendre ou d’entendre les mots qui sont prononcés. Ils savent être reconnaissants pour la beauté simple de la nature. Ils se relient à des bribes de spiritualité, on les voit entrer véritablement dans cet espace différent du quotidien. Et puis la musique, les vieux cantiques enregistrés et chantés, ou les refrains de Taizé, ou d’autres mélodies qu’ils et elles ont entendues dans les moments sacrés de leurs existences. On peut avoir tout oublié du passé, ou même du présent, et retrouver au fond du coeur, au fond de l’âme les mots et la mélodie de «j’ai soif de ta présence…». Quelle sérénité alors se dessine sur le visage.

C’est par l’ensemble de tout cela aussi que la Parole peut se faufiler à nouveau jusqu’au fond des coeurs et parfois réveiller une source tarie. Mais qui était bien là. Et soudain mystérieusement, la présence et la paix.

Revenons à la Semaine sainte: nous avons pu vivre un moment autour du texte du lavement des pieds, en faisant circuler une bassine d’eau où tremper les mains, simplement, en prenant conscience de l’offre du Christ à nous laver. Un moment de recueillement fort, certains touchant l’eau du bout des doigts mais d’autres à pleines mains, et puis cet homme qui a pris l’eau pour s’en laver tout le visage, éveillant l’écho de la parole de Pierre: «Alors Seigneur, pas seulement les pieds!»

Et puis bien sûr, la cène ou l’eucharistie, le repas par excellence qui réveille le souvenir et la présence. Ce sont toujours des moments forts, avec une conscience, même chez des personnes par ailleurs un peu absentes, qu’il se vit là et maintenant un peu d’éternité. Les paroles et le pain «le corps du Christ» sont reçus avec attention et respect, comme ce qui donne véritablement la vie.