Des textes fondateurs?

Torah, Bible et Coran... des textes fondateurs? / @iStock
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Torah, Bible et Coran... des textes fondateurs?
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Des textes fondateurs?

Pierre Gisel, professeur honoraire de théologie UNIL
30 avril 2021
TRADITIONS
Le théologien Pierre Gisel a réagi face à cette expression qui s’impose. Est-elle si neutre que ça ?

«Textes fondateurs», l’expression s’est accréditée depuis une dizaine d’années, y compris, parfois, dans Réformés. Or, elle est nouvelle. S’y arrêter peut donc s’avérer être suggestif.

L’expression vient d’un usage laïc, non confessionnel. Elle se veut neutre. Chacun a alors ses textes. Ainsi dans les monothéismes juif, chrétien ou musulman: la suite Torah-Prophètes-Ecrits; la Bible chrétienne; le Coran.

Mais l’expression peut égarer. C’est, d’abord, qu’il n’y a pas de textes dits fondateurs sans une tradition qui y donne accès et en soit une réception. Dès lors, juger d’une tradition, c’est évaluer non ses textes, mais ce qu’elle en fait.

 

Juger d’une tradition, c’est évaluer non ses textes, mais ce qu’elle en fait.
Pierre Gisel

Secondement, renvoyer à des textes fondateurs induit l’idée qu’ils précèdent les traditions qui s’y réfèrent, alors que, mettant en scène des événements anciens, ils cristallisent la mémoire d’une tradition en train de se constituer. Un moment qui doit être médité. Et non pour le disqualifier, ce que fait trop souvent la critique moderne, mais pour le valider. C’est en effet le moment d’une instauration, celle d’un sens proposé.

En terrain laïc, dire «textes fondateurs» neutralise ce qu’est une religion et, en terrain religieux, peut se trouver en consonance à repli fondamentaliste.