Noël, c'est Dieu qui croit en l'humain

© Mathieu Paillard
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© Mathieu Paillard

Noël, c'est Dieu qui croit en l'humain

Célebration
La crise sanitaire que nous traversons nous confronte tous à l’insécurité et à la perte de repères. Le coronavirus a perturbé les célébrations pascales du printemps passé. Va-t-il aussi nous priver de Nativité?

En 2020, Noël ne ressemblera pas à Noël. Du fait de la pandémie, nombre d’aînés auront été fauchés par la maladie en cette fin d’année, laissant derrière eux autant de familles en deuil. Près de la moitié des Suisses peinent désormais à payer leurs factures. Et à l’heure où j’écris ces lignes, personne ne sait si nous pourrons nous réunir librement fin décembre.

Aujourd’hui, pour la première fois depuis longtemps, nous nous confrontons en tant que société et en tant qu’individus à la précarité d’un monde que nous croyions solide. Ici, en Suisse, la maladie et la mort sont venues ramper jusque dans nos maisons, elles ont étouffé nos relations, emporté avec elles plus que leur dû… et qui sait jusqu’à quand cela perdurera?

Je crois pourtant que ce Noël sera un vrai Noël. Il n’aura, certes, pas le parfum des repas de fête et des retrouvailles. Il ne donnera pas lieu à la surenchère frénétique et joyeuse à laquelle nous sommes habitués. Mais il ressemblera un peu à la première nuit, quand un bébé venait au monde sans vrai toit sur la tête.

Douter que l’on puisse célébrer Noël dans les conditions actuelles, c’est oublier que la naissance du Christ est marquée du sceau du dénuement et de l’incertitude. La Nativité, dans la Bible, c’est d’abord l’histoire d’une jeune fille de rien qui tombe enceinte hors mariage, d’un fiancé désemparé sur le point de la répudier et d’un accouchement dans le froid au milieu des bêtes. Néanmoins, c’est là que Dieu s’en remet à des bras humains, en la personne d’un nouveau-né. Il épouse les contours de l’existence dans ce qu’elle a de plus concret et de plus fragile.

L’incarnation est, pour moi, le mystère le plus incompréhensible du christianisme. Elle implique que Dieu rejoint les humains dans leurs limites pour montrer ce qu’elles ont de digne et d’estimable. L’incarnation ne dit rien du mérite humain, de la ferveur de leur foi ou de la perfection de leur vie. Elle révèle seulement un Dieu qui croit en eux.

Cette fin d’année, il sera sans doute difficile d’exiger de nous-mêmes la joie au milieu de l’angoisse, et la confiance dans l’incertitude. Malgré tout, la Bible annonce encore cette nouvelle à qui veut l’entendre, obstinément: le sens premier de Noël, ce n’est pas croire en l’adversité. C’est seulement recevoir la confiance que Dieu nous porte.

Ecoutez cette méditation en audio sur www.reformes.ch/ecoute

Méditation

Ce petit texte dit l’incarnation de manière plus percutante et concrète que beaucoup de traités théologiques. Son auteur, Bernard de Clairvaux, est un éminent moine cistercien du XIIe siècle.

Je jette un regard sur la conception
et la naissance du Sauveur
et je me demande si peut-être,
au milieu des innombrables nouveautés et
merveilles que découvre celui qui regarde
toute chose attentivement, j’apercevrai
aussi celles dont me parlent les prophètes.

Or, que vois-je là? La longueur qui s’est
rétrécie, la hauteur qui s’est abaissée
et la profondeur qui s’est nivelée.
Je vois une lumière qui ne luit plus,
le Verbe qui bégaie, l’eau qui a soif
et le pain qui a faim.
Bernard de Clairvaux

L’auteure de cette page 

Noriane Rapin est journaliste à RTS religion et productrice des cultes radiodiffusés. Auparavant, elle a suivi des études de théologie à Lausanne, Genève et Neuchâtel. Elle a ensuite effectué un stage pastoral dans l’Église réformée vaudoise, avant de se tourner vers les médias. 

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