Pâques en EMS, quand la tradition nourrit l’espérance

Pâques dans les EMS. Les Cerisiers, Payerne. / © Anne-Marie Droz
i
Pâques dans les EMS. Les Cerisiers, Payerne.
© Anne-Marie Droz

Pâques en EMS, quand la tradition nourrit l’espérance

Anne-Marie Droz
25 mars 2021
Evocation
Si Pâques est une espérance, c’est aussi des souvenirs et des émotions à partager ensemble.

Les arrivants à la célébration regardent le bouquet, l’image, la bougie, la bible sur son chevalet. «C’est toujours beau les fleurs au printemps.»

La musique s’élève, l’attention est là. Puis les mains se joignent pour la prière. Des mains aux veines saillantes et bleues, les doigts tordus, ou des mains usées par le travail de la terre, les ongles larges et carrés. Elles se joignent pour ce moment : Dieu est là. Le cœur qui prie n’a pas une ride.

Les temps de célébration sont des moments forts et riches en émotion, des moments qui ont l’épaisseur de toutes les autres Pâques déjà vécues. Car l’espérance qui peut alors s’apercevoir prend sa source dans une longue et souvent belle tradition. Beaucoup de souvenirs émergent : de ces Pâques lumineuses, fêtées en de grandes assemblées dans des églises pleines. Souvenir du cantique «A Toi la Gloire» entonné par des dizaines de voix. Et rechanté depuis lors de bien des services d’adieu, comme un rappel de notre destinée finale. Ensuite venaient la grande tablée, le rôti et les œufs roulés. La fête des hommes est belle aussi.

Ils se souviennent, ils racontent: à Pâques, on avait le droit de participer à la communion, à la fin de catéchisme, après la confirmation. C’était le passage dans l’âge adulte, pour l’une des premières fois, l’accès au mystère, l’entrée dans le cercle des croyants. Vécu plus ou moins intensément, mais le souvenir physique d’un temps spirituel important.

Pâques, c’est souvent d’abord le réveil et l’évocation de ces temps-là, le printemps, la lumière, la jeunesse, la vie de jeune adulte qui commence. C’est plus tard que vient l’élément de l’espérance de la résurrection liée à cette commémoration. La célébration de Pâques, c’est aussi vibrer au récit de la Passion, des souffrances et de l’impuissance du Christ, comme un écho douloureux de ses propres insuffisances. Ce récit de l’homme Dieu se rendant à la mort, son dernier repas, la trahison, sa prière, seul à Gethsémané, combien de moments qui au fil de l’expérience de vie sont compris en profondeur, et revécus avec lui, qui a vécu chaque vie dans ce qu’elle a de sombre. Et puis la croix, et puis le tombeau, et puis ce jour de lumière.

Cette dame est en larmes en sortant de la célébration: «Dire que j’avais oublié de si belles choses.»

La force de ce récit de Pâques, porté par la répétition, c’est de faire irruption dans l’avenir personnel de chacun. Un jour qui a été, dont le souvenir est répété inlassablement, pour devenir, par le souffle de l’Esprit, force de vie et d’espoir pour aujourd’hui. Et autour de la célébration, même si certains mots s’échappent, les visages de s’illuminer, les mains de se joindre pour une prière fervente et les voix de jaillir avec émotion: «A Toi la gloire, O Ressuscité, à toi la victoire pour l’Eternité!»

L’espérance de Pâques dans les EMS, c’est aussi se rappeler ensemble, inlassablement au fil des semaines la présence du Ressuscité, ouvrir les yeux sur tous les petits signes de vie, d’amour, de renouveau. L’aumônière Corinne Gossauer Peroz, qui est active dans la Broye, a édité l’an dernier aux Editions Saint-Augustin, un petit ouvrage tiré de ses rencontres, avec des prières simples et inspirées, sous le titre «Garde-moi vivant». Je termine avec ses mots: «La nuit comme le jour, Toi qui n’es qu’amour, Donne à mon cœur d’aimer, Et de t’aimer jusqu’à la fin, Jusqu’au grand rendez-vous d’amour!».