Centre d’enregistrement des requérants d'asile à Vallorbe :l’aumônerie sert de guichet d’information et de consigne à soucis

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Centre d’enregistrement des requérants d'asile à Vallorbe :l’aumônerie sert de guichet d’information et de consigne à soucis

7 février 2002
A quoi ça sert des aumôniers au Centre d’enregistrement de Vallorbe, au milieu de 200 requérants venus de tous horizons, inquiets et ignorants de leur sort et de la durée de leur séjour dans ce lieu de triage, mais aussi de la procédure à laquelle il leur faudra se plier? Rencontre avec Hélène Küng, pasteure
«L’équipe d’aumôniers,- quatre en tout -, sert avant tout de guichet d’information, explique la pasteure Hélène Küng, aumônière titulaire avec le curé Jean-Pierre Barbey, au Centre d’enregistrement de Vallorbe depuis plus d’une année. les requérants reçoivent peu d'informations officielles, nous pallions le manque d’explications sur la procédure qui va suivre son cours sans la cautionner, nous essayons d’orienter les requérants auprès dd'instances qui pourront les aider à Vallorbe même,: service juridique SAJE-Vallorbe, mandataires bénévoles d'ELISA -Vallorbe, lieu d'accueil et d'écoute de l'Association ARAVOH. Nous leur proposons de la documentation de l'Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR). Nous leur donnons toutes les informations générales possibles sur la procédure d’asile compliquée et contraignante, le pourquoi de telle étape, mais nous ne pouvons en revanche pas les informer sur leur dossier personnel auquel nous n’avons pas accès. »

§L'incertitude et l'angoisseC’est à une population déboussolée, contrainte à l'inactivité et angoissée que les aumôniers, aussi bien catholiques que protestants ont affaire. Certains requérants, fraîchement arrivés, repartent tout aussitôt, alors que de plus anciens demandeurs d’asile sont encore au Centre à poireauter, sans être fixés sur ce qui les attend. Seront-ils renvoyés de Suisse? Dans quel canton va-t-on les acheminer ? Seront-ils séparés de la parenté avec laquelle ils sont venus, la loi suisse ne prévoyant de regroupement familial qu’avec père, mère conjoint(e) et enfants mineurs?

« Un sentiment d’arbitraire, de découragement et de méfiance envahit les requérants qui restent au Centre un certain temps et qui ont l’impression d’avoir été laissés sur le carreau, loin de tout, précise Hélène Küng. Cela contribue à tendre les relations entre résidents, à favoriser les risques de conflit.

§Bricoler un dialogue avec tout le mondeDu lundi au jeudi, les aumôniers du CERA de Vallorbe assurent à tour de rôle une permanence de 9 heures à 11 heures et de 14 à 17 heures dans un petit local qui jouxte le réfectoire où tout le monde se rend plusieurs fois par jour. « On est là pour tout le monde, qu’importe la religion, les origines, les motifs d’exil des requérants. Nous bricolons avec les mots que nous connaissons pour nous faire comprendre de ceux qui ne parlent ni français ni allemand, ni anglais. Nous essayons d’apporter un peu de réconfort, de redonner du courage à ceux qui arrivent désespérés. On n’a hélas pas un sachet d’espoir pour chacun, il est des situations si accablantes pour lesquelles nous ne pouvons absolument rien. Nous essayons alors de permettre à chacun d’apprivoiser ce qu’il est en train de vivre, mais aussi ce qu’il redoute, un renvoi possible. Nous essayons de permettre à ceux qui viennent nous trouver de déposer leurs soucis et de dire leurs craintes. »

A peine arrivé, le requérant se voit attribuer un lit dans un dortoir, hommes et femmes séparés. Ses empreintes digitales sont prises, ainsi qu’une photo d’identité. Il passe alors une visite médicale, au cours de laquelle il est vacciné. On procède ensuite à son audition sommaire. Puis il attend. Sans contact avec l’extérieur. Le Centre n’est pas une prison, mais n’est pas non plus un lieu public ouvert, il faut une clé pour y entrer, des permissions pour en sortir. Certains doivent passer une seconde audition. Tout cela est très éprouvant pour les requérants, Hélène Küng le sait trop bien.

Les Eglises tant protestante que catholique, tiennent à ce ministère, si minuscule l’aide apportée soit-elle, parce qu’elles se sentent des responsabilités envers les plus fragilisés de notre société, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent ».

§Sentiment d'impuissance La marge de manœuvre des aumôniers est faible et un sentiment d’impuissance s’empare parfois d'eux. « "Parler avec les gens ne les tire pas d’affaire, c’est simplement un répit, une présence humaine que nous pouvons leur offrir, poursuit Hélène Küng. Nous prions avec ceux qui nous le demandent. Nous ne pouvons pas grand chose que témoigner de notre solidarité. Nous sommes là sur leur chemin, pour apporter notre grain de sel."

Hélène Küng, petit bout de femme pragmatique, lumineuse et pleine d’énergie, ne se laisse pas abattre. Elle est payée en retour d’un regard fugitif qui dit que l’autre va mieux, d’un sourire, de temps forts chargés d'humanité, de moments où elle assiste à la naissance de solidarités spontanées.