Musée international de la Réforme à Genève: A la recherche des racines protestantes

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Musée international de la Réforme à Genève: A la recherche des racines protestantes

7 avril 2005
Avec l’ouverture la semaine prochaine du Musée international de la Réforme, Genève sera, plus que jamais, la capitale du protestantisme
Près de 400 m2 intelligemment utilisés dans un site magnifique en pleine vieille ville, pour raconter l’histoire d’un mouvement qui changea la face du christianisme.

C’est un événement pour Genève et pour le rayonnement de la foi protestante. A la fin de la semaine prochaine, le 16 avril exactement (lire encadré), s’ouvrira dans la cité de Calvin le Musée international de la Réforme. Sur près de 400 m2, à côté de cathédrale Saint-Pierre et de l’auditoire Calvin, chacun pourra découvrir un passionnant périple à travers l’histoire de ce qui constitua un événement majeur de l’histoire du christianisme.

Selon Olivier Fatio, ancien professeur de théologie et cheville ouvrière du projet, la difficulté de l’entreprise consistait « à la fois de ne pas évangéliser mais aussi d'éviter d’évoquer la foi protestante comme quelque chose de mort, appartenant au passé ». Le pari consistait donc à « restituer avec conviction les racines d’une idée encore vivante », à créer un pôle de « mémoire et de transmission de la culture et de la foi protestantes tourné vers l’avenir » pour le dire avec les termes de la directrice Isabelle Graesslé, ancienne modératrice de la Compagnie des pasteurs et diacres du canton.

Mises en scènes originales de sujets ardus

Pour cela, le Conseil de fondation a choisi un binôme de vieux briscards, René Schmid et Sylvia Krenz, qui comptent à leur actif de nombreux accrochages d’exposition. La première préoccupation des deux expographes – le nouveau terme approprié, paraît-il – fut architecturale. « Ici, dans cette maison Mallet construite sur le site qui vit l’adoption par Genève de la Réforme le 21 mai 1536, il était impossible de travailler sans tenir compte de la spécificité du lieu », expliquent-ils. Il fallut donc rénover l’intérieur, tout en conservant la configuration des pièces, celle d’une maison bourgeoise du XVIIIe siècle. Autre difficulté : « Il ne subsiste que peu d’objets de cette période, explique René Schmid. Il s’agit essentiellement d’imprimés, de bibles, de gravures et d'écrits ». Et de tableaux, représentant surtout des réformateurs alors qu'il étaient déjà âgés, alors même qu'ils n'étaient encore que de jeunes théologiens plein d'énergie quand le mouvement a été lancé. Du coup, comment éviter une présentation trop austère d’un thème plutôt élitaire ? En donnant à chacune des dix salles une identité propre et en y proposant une série d’animations audio-visuelles propres à rendre le sujet particulièrement attrayant.

En bonne théologie réformée, tout commence avec la Bible, puis se poursuit suivant un découpage à la fois chronologique et thématique. Les origines de la Réforme avec Luther et Zwingli, le rayonnement de la « Rome protestante » et l’apport de Calvin dans l’organisation du culte, de la ville et de l’école ; les guerres de religion, la persécution des huguenots français et l’épisode cévenol du « Désert » après la révocation de l’Edit de Nantes : autant d’épisodes évoqués par de nombreux documents originaux. Grâce à un audio-guide en trois langues et divers autres moyens audiovisuels, des problématiques parfois complexes sont abordées avec facilité. « Avec ces différents niveaux de lecture et de découverte, nous espérons toucher tous les publics. Rafraîchir la mémoire des spécialistes et en créer une pour tous les autres ».

Une pause musicale

Ainsi, pour évoquer l’ardue controverse concernant la prédestination, les deux expographes ont créé la salle du banquet.Des assiettes parlantes s’illuminent tour à tour. Et voilà que Calvin, Théodore de Bèze et même Jean-Jacques Rousseau convoqués à soutenir ou combattre la nouvelle doctrine qui constituait un enjeu théologique majeur. Dans le salon, pièce centrale de la visite, une dizaine d’écrans offre une vision globale de l’histoire du mouvement à travers un petit film de huit minutes. « Nous racontons la Réforme à travers les questions d’un enfant. Olivier Fatio avait envie de tout dire mais évidemment, avec une durée aussi courte, il a fallu se limiter à l’essentiel », ravconte Sylvia Krenz. L'essentiel est dense, complété par la découverte d’une très riche collection d'ouvrages anciens - Bibles et manuscrits - et d’écrits originaux des réformateurs. Le visiteur fatigué pourra toujours s’asseoir dans le cabinet de musique et écouter un choix de psaumes huguenots, de chorals luthériens ou de cantiques plus contemporains. Avan de se rendre dans la petite librairie qui propose une série d’objets à l’effigie du musée, mais surtout un choix d’ouvrages et de guides consacrés à la Réforme.

Pour l'époque moderne, le musée propose également dans ses sous-sols une courte évocation du XXe siècle protestant avec des panneaux rappelant l’existence des missions et autres oeuvres sociales, les lents efforts oecuméniques et l’importante place des femmes dans le ministère pastoral. L’engagement politique n’est pas oublié, avec des figures comme Karl Barth ou Martin Luther King. « Même si nous ne pouvions nous limiter au passé, c’est tout de même cet aspect que privilégie tout musée. Nous sommes en plein accord avec l’Eglise de Genève, mais notre approche est clairement culturelle. Et notre rôle n’est pas de dire ce que doit être le protestantisme de demain », souligne encore Olivier Fatio. En revanche, le musée réussit pleinement à mettre en valeur le rayonnement culturel et spirituel qui fut celui de la Genève réformée.

UTILE

Le Musée ouvrira ses portes le samedi 16 avril. Dès 10 heures, visite et grande fête. Le lendemain dimanche, culte à la cathédrale voisine dès 10 heures. L’après-midi, découverte du « Circuit de la Réforme » dans la vieille Ville.