Sortie du tome 2 de la revue « La chair et le Souffle » :La compassion, ce non radical à l’indifférence

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Sortie du tome 2 de la revue « La chair et le Souffle » :La compassion, ce non radical à l’indifférence

12 avril 2007
Le chauffeur afghan qui accompagnait un journaliste italien pris en otage, décapité au sabre sous nos yeux effarés ; des victimes ensanglantées, agonisant dans les décombres des attentats perpétrés à Alger ; une fillette irakienne aux jambes atrocement mutilées par une explosion à Bagdad ; des phoques terrorisés, battus à mort au gourdin au nord du Canada: livrées sans état d’âme par les rédactions des journaux télévisés, cet enchaînement d’images chargées d’une violence et d’une douleur effarantes, sont insupportables, à moins de se blinder dans l’indifférence
Choqué, impuissant, désespéré, le téléspectateur a tendance à refouler la douleur exhibée. Dans ce contexte de mise en spectacle médiatique, la compassion a-t-elle encore un sens et peut-elle être pratiquée, ou est-elle vouée à être refoulée ? C’est la question que pose le bibliste Luciano Manicardi, frère de la communauté monastique œcuménique de Bose (Italie), dans le dernier numéro de la revue de théologie et de spiritualité « La Chair et le Souffle ».

A l’invitation de la théologienne Lytta Basset, une brochette de théologiens et de biblistes, maids aussi un rabbin et un sociologue de confession orthodoxe, cherchent à mettre en perspective la compassion, à la définir comme mode de vie, écoute de celui qui souffre, humanisation de l’homme, comme respect et acceptation de l’autre dans sa fragilité et sa souffrance. La compassion, analyse Luciano Manicardi, est le non radical à l’indifférence face au mal du prochain, elle est choix, responsabilité et solidarité, ou si l’on préfère « compréhension fraternelle », selon les termes de Martin Luther King. Pour Emmanuel Levinas, dont « Une éthique de la souffrance » a été revisité pour l’occasion, la compassion est « le fait de soustraire la douleur à la solitude, c’est cette relation étrange qui commence dans la douleur, dans la mienne où je fais appel à l’autre et dans la sienne qui me trouble, dans celle de l’autre qui ne m’est pas indifférente. La compassion, c’est-à-dire étymologiquement souffrir avec l’autre, c’est la chose qui a le plus de sens dans l’ordre du monde, dans l’ordre normal de l’être ».

A une époque qui ne valorise pas la culture de l’écoute de l’autre, les textes réunis dans ce numéro sont une vibrante invitation à une compassion qui prend parfois l’être humain au dépourvu et révèle quelque chose de Dieu.La chair et le souffle, la compassion, no 1, 2007, revue semestrielle publiée par la Faculté de théologie de Neuchâtel.