Les pasteurs d‘Oklahoma prêchent en sweat à capuche, pour protester contre un projet de loi de l’Etat

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Les pasteurs d‘Oklahoma prêchent en sweat à capuche, pour protester contre un projet de loi de l’Etat

Greg Horton
9 février 2015
De nombreux pasteurs d’Oklahoma n’ont pas prêché dans leurs traditionnelles robes noires, mi-janvier à la veille de la journée Martin Luther King Jr, mais dans des sweats à capuche pour protester contre un projet de loi de l’Etat qui viserait d’interdire le port d’un masque, d’une capuche ou le recouvrement du visage en public dans certaines conditions. Alors qu’une session du Sénat de l’Etat est en cours, le débat sur ce projet a été repoussé, selon les médias locaux.

Photo: Le pasteur Jesse Jackson porte un hoodie, DR.

, Oklahoma City, RNS/Protestinter

Le révérend Jesse Jackson, ministre des Disciples du Christ à Oklahoma City, qui pourtant n’est pas connu en tant que militant des droits civiques, a appelé les pasteurs à prêcher en sweat à capuche, ou hoodie, parce qu’il estime qu’un projet de loi qui sera prochainement présenté est conçu comme une attaque contre la dissidence. «Le texte tel qu’il est rédigé vise directement les masques de Guy Fawkes qui ont été utilisés dans le cadre du “mouvement d’occupation”, et il vise les capuches, qui sont devenues de puissants symboles après la mort de Trayvon Martin, dans le cadre du mouvement “Black Lives Matter”», explique-t-il.

Triste anniversaire le 26 février prochain

Il y aura bientôt trois ans en effet que dans la nuit du 26 février, Trayvon Martin, un adolescent afro-américain portant un sweat à capuche a été tué par un membre d’une milice locale, qui patrouillait armé. Cet homme a été acquitté au terme de son procès, et trois femmes indignées ont alors créé «Black Lives Matter», un mouvement de protestation contre la violence policière ou de milice, et la discrimination raciale ou de genre. Le sénateur de l’Oklahoma, le républicain Don Barrington, a nié que les sweats à capuches soient visés par le projet de loi. Selon la chaîne de télévision locale Koco, ce projet ne sera pas débattu durant la session actuellement en cours du Sénat de l’Etat.

La seule situation d’urgence est budgétaire

Mais le révérend Chris Moore de la Congregational Church Fellowship, une église unie de la Congrégation du Christ à Tulsa, dans le même état, s’est dit aussi préoccupé par les implications du projet de loi. Le projet de loi évoque une situation d’urgence, ce qui signifie que si la loi passe, elle entrerait immédiatement en vigueur. «C’est quoi, la crise?», a demandé Chris Moore, qui a porté un sweat à capuche dimanche 18 janvier. «Nous n’avons personne qui erre dans les rues portant des capuches ou des masques et commettant des crimes. Mais ce que nous avons, c’est un déficit budgétaire de 300 millions de dollars!»

Le pasteur Moore a mentionné la mort de Trayvon Martin, l’adolescent de Floride non armé tué par George Zimmerman. Trayvon Martin portait un sweat à capuche lorsqu’il a été abattu. «Je ne sais pas si le sénateur est inconscient du contexte», a déclaré Chris Moore, «mais, je suis plus préoccupé par le fait qu’il en est conscient, et a écrit ce projet de loi de malgré tout.»

Un mouvement de grande envergure était attendu

Un décompte précis du nombre de pasteurs qui ont enfilé un sweat à capuche pour prêcher le 18 janvier n’est pas disponible. Mais Jesse Jackson a dit qu’il avait entendu des collègues en parler, y compris les personnes hors de l’état, et que la participation était prometteuse. La veille du 18 janvier, il déclarait: «je ne sais pas combien de pasteurs seront en sweat à capuche, mais je sais qu’il y aura beaucoup de paroissiens qui en porteront aussi.»

Le masque qui fait débat

Le masque de Guy Fawkes dont il est question est l’œuvre de l’illustrateur David Lloyd, qui le fait porter à son personnage, «V», héro complexe de bande dessinée, à la fois anarchiste, justicier et terroriste. La série est adaptée au cinéma en 2006, et rend célèbre le portrait stylisé de Guy Fawkes, qui se met à circuler sur les réseaux internet. (Photo CC(by-sa)Vincent Diamante)

Il a été récupéré par une communauté en ligne de hacktivistes, Anonymous, un mouvement non violent qui lutte pour la liberté d’expression Le masque a tout d’abord été utilisé par le groupe dans le cadre du projet Chanology, une vague de protestations de plusieurs mois menée en 2008 par le mouvement Anonymous contre l’Eglise de scientologie et ses pratiques coercitives à l’encontre de ses détracteurs. Les manifestants ont été encouragés à cacher leurs visages, car les membres de l’Eglise de scientologie photographiaient systématiquement les manifestants. Le port du masque de Guy Fawkes s’est progressivement généralisé, et a pris un statut symbolique au sein du groupe.

Il a ensuite été utilisé par le «mouvement d’occupation», un mouvement international de protestation sociale, dont le but déclaré est de lutter contre les inégalités économiques et sociales. C’est un mouvement qui est assimilé au mouvement des Indignés, et présent effectivement sous diverses appellations aux Etats-Unis, en Amérique du Sud et en Europe, en Inde, au Moyen-Orient où plusieurs pays ont déjà interdit le port du masque, de même qu’au Canada, où le fait de porter ce masque est passible d’une peine de 10 ans de prison.

Un peu d’histoire

La nuit de Guy Fawkes, ou Bonfire night est une commémoration traditionnelle, qui a lieu principalement en Grande-Bretagne. Elle marque l’anniversaire de ce que l’histoire a appelé la Conspiration des poudres, et commémore le fait que le roi Jacques Ier a échappé à l’attentat. Cette nuit du 5 novembre 1605, un groupe de catholiques anglais menés par Sir Robert Gatesby et Guy Fawkes tentèrent de faire sauter le Parlement. En désaccord avec la politique du roi concernant les protestants, ils avaient entreposé dans une cave sous la chambre du parlement une trentaine de barils de poudre. Les conspirateurs ont été arrêtés et exécutés pour trahison après l’échec du complot.

La veille des festivités, les enfants préparent des effigies de Guy Fawkes lors de concours organisés entre les différentes écoles, et la marionnette sélectionnée est brûlée le soir du 5 novembre, à grand renfort de feux d’artifice.