Croire en Dieu ou en la science ?

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[pas de légende]

Croire en Dieu ou en la science ?

Reto Gmünder
6 novembre 2022
Billet de Reto Gmünder, pasteur du Par8 et de la paroisse réformée de Haute-Birse, paru dans le Journal du Jura, le samedi 5 novembre.

J’ai lu récemment, dans un magazine, une enquête de type micro-trottoir, cherchant à savoir si les Suisses croyaient toujours en Dieu. J’ai été frappé par la diversité des réponses. Les plus affirmatives variaient entre confessions de foi plutôt conventionnelles et acceptations diffuses d’un fondement insaisissable à l’existence. Mais ce sont surtout les réponses négatives qui ont retenu mon attention. Une vaste majorité d’entre elles contenaient en effet cette étrange affirmation : « Je ne crois pas en Dieu, car je crois en la science ».

Etrange paradoxe que celui de croire (sic !) en la science. Mais surtout, il me semble régner ici un double malentendu. Tout d’abord, la foi en Dieu ne s’oppose pas à la science. Elle n’est pas une adhésion irréfléchie à des affirmations irrationnelles, aveugle et sourde à toute avancée scientifique. On ne peut pas réduire la religion à de l’obscurantisme, même si celui-ci est prônée par certaines communautés extrémistes. La foi n’empêche pas de savoir que la terre est ronde ou d’admettre les théories de l’évolution et du « big bang ».

D’un autre côté, il ne faut pas non plus réduire la raison à sa seule expression scientifique. La science n’a pas le monopole de la vérité. Si la vérification d’une affirmation par l’observation ou l’expérimentation est une méthode qui a fait ses preuves pour ce qui est du monde visible et tangible, spatio-temporel et « matériel », l’être humain a de tout temps cherché, par sa raison, à percer des mystères qui dépassent ce domaine :  Qu’est-ce que la réalité ? Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Comment le changement est-il possible ? Qu’est-ce que la permanence ? Qu’est-ce que le bien, le beau, le vrai et le juste ? Et peut-être la plus importante de toutes : Quel est le sens de tout cela ? Pour Aristote déjà, la philosophie était composée de trois branches distinctes et complémentaires : les mathématiques, la physique et la métaphysique.

Limiter les capacités de la raison humaine à sa seule expression scientifique me parait dès lors très réducteur, voir même dangereux pour l’avenir de notre espèce. Je suis ainsi d’avis que l’être humain peut « croire » en la science, tout en croyant aussi en la justice, en l’amour, en la beauté, en la philosophie, en l’art… et pour beaucoup d’entre nous : croire en Dieu.