Cet autre que j'ai envie de connaître

Joël Burri / ©DR
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Joël Burri
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Cet autre que j'ai envie de connaître

Edito
Les règles de bienséance recommandent d’éviter de parler d’argent, de religion ou de politique à table. Ces sujets sont supposés être de ceux qui fâchent...

Et probablement que, dans cette logique, les débats de type Mac ou PC, Marvel ou DC Comics, plutôt Coop ou Migros, chien ou chat, sont aussi à proscrire. Dès lors, faut-il accompagner les repas les plus divins de conversations aussi fades qu’un camembert industriel? Et peut-on se sentir à l’aise s’il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de prononcer la moindre parole?

Mais pourquoi ces sujets fâchent-ils, s’est demandé le spécialiste en psychologie morale américain Jonathan Haidt. Dans son livre The Righteous Mind: Why Good People are Divided by Politics and Religion, paru il y a une dizaine d’années et repéré par l’agence québécoise Science-Presse (re.fo/division), il émet l’hypothèse, sur la base d’études de l’activité cérébrale de volontaires, que nos cerveaux sont conçus surtout pour convaincre, nettement moins pour entendre des arguments. Le résultat d’une longue évolution qui a toujours favorisé les individus les plus convaincants.

S’ouvrir à l’autre et à ses idées nécessite donc un peu de volonté: apprendre à connaître l’autre implique un effort. Passé ce premier écueil, il devient parfaitement possible de nouer une relation riche, malgré des désaccords.

Peut-être faudrait-il réviser les manuels de bienséance? Pour que chacune et chacun se sente accueilli lors d’un repas, dans une communauté, dans une paroisse, le secret n’est pas de rendre certains sujets tabous ni même d’espérer mettre tout le monde d’accord, mais de donner à chacune et chacun la possibilité d’être entendu.